samedi 3 décembre 2016

Ma vie dans une tente prospecteur ou wall tent

Dans la dernière chronique je vous ai lancé au passage que j’habitais dans une tente prospecteur (wall tent en anglais). C’était pas des jokes ! Nous sommes emménagés au début octobre et y sommes toujours !
 
Commençons par le début : qu’est-ce qu’une tente prospecteur ?
Une tente prospecteur est une tente en toile avec des murs, un toit, un trou pour la cheminée et une fermeture éclair en guise de porte. La différence avec une tente standard, c’est qu’on peut être debout à l’intérieur, que c’est beaucoup plus grand (la nôtre est environ 16 x 16 pieds si je me rappelle bien), qu’on peut la chauffer à l’aide d’un petit poêle à bois spécialement conçu pour ce type de tente, et que le matériel qui la constitue est beaucoup plus solide et durable. Une option intéressante pour un séjour de longue durée ! Par contre, il est beaucoup plus lourd et volumineux de transporter une tente prospecteur qu’une tente standard, et l’assemblage peut prendre 1-2 heures.
La charpente se construit à partir d’arbres. Il suffit de construire deux structures triangulaires à chaque bout, et y asseoir un arbre horizontalement entre les deux structures. Ensuite, on attache le toit de la tente sur la partie horizontale, et on tend les murs avec des cordes attachées à des arbres environnants. Et voilà ! En quelques heures, vous avez une maison! Pour une utilisation à plus long terme, il est toujours mieux d’installer une toile au-dessus du toit pour plus d’isolation, surtout en saison froide. Si vous avez accès à de la neige, on peut en entasser le long des murs extérieurs afin de réduire l’entrée d’air à l’intérieur de la tente.
Les tentes prospecteurs sont souvent utilisées dans les camps de base lors d’expédition lorsqu’on peut se permettre de les transporter, ou dans les camps de travailleurs ou chercheurs qui travaillent dans des régions inhabitées dans le nord, par exemple.
Pour plus d'isolation, ajouter une toile de protection
Mais puisqu’au Yukon, on aime bien ça le style de vie de bois, il n’est pas rare de voir des gens VIVRE dans des tentes prospecteurs à long terme. Les yourtes et les petits chalets de bois rond sont tout aussi populaires. Il suffit de connaître quelqu’un qui a un bout de terrain pour installer votre tente, et le tour est joué ! Avec un peu de chance, vous aurez peut-être accès à une extension électrique d’une maison qui est sur le même terrain, et vous voilà maintenant éclairé ! Quoi que l’été, l’éclairage n’est jamais un problème au Yukon – on a de la lumière presque toute la nuit !
L’intérieur de la tente peut contenir pas mal de choses, tout est une question de gestion de l’espace. Nous avons un lit double, deux tables (une pour manger, l’autre pour cuisiner), un meuble pour les vêtements, deux petites étagères pour le rangement, et le poêle à bois. Il faut considérer que l’espace le long des murs est plus ou moins utilisable pour les tâches debout, étant donné l’angle du toit. C’est pourquoi nous avons décidé d’en faire de l’espace de rangement d’y mettre des meubles dont on n’a pas besoin d’être debout pour les utiliser (ex : lit ou table à manger !)
Intérieur de la tente
L’idée d’identifier les biens qui sont essentiels de ceux qui ne le sont pas fut un excellent exercice en soit, dans une société où la consommation est maximale. J’ai vendu beaucoup de choses avant de déménager dans la tente, mais je dois admettre que beaucoup d’autres choses sont encore entreposées dans mon ancien appartement (d’ailleurs je remercie mes colocs d’avoir accepté de garder mes choses en attendant que je termine ce projet de vie dans les bois !), chez ma belle-mère ou même dans mon char… Mais, cela dit, j’ai tout de même dû déterminé quels sont les biens que je devais entreposer et ceux que je devais nécessairement emmené à la tente. Je ne vous mentirai pas  - j’ai dû retourné de multiple fois à mon ancien appartement pour aller chercher des choses que j’avais oubliées ou ramené des choses que je n’utilisais pas autant que j’aurais pensé. Mais bon, ça fait partie du processus d’apprentissage. J’ai une grande admiration pour les gens qui prennent la décision de se débarrasser de leurs choses pour de vrai sans entreposer rien et vivent ce style de vie à long terme, car ce n’est pas quelque chose qui est nécessairement facile à faire.
Maintenant qu’on a déterminé l’essentiel, il faut maintenant identifier les choses qui doivent essentiellement être à l’intérieur la tente de celles qui peuvent demeurer à l’extérieur. Avec un espace si restreint, on ne peut pas se permettre d’avoir deux paires de bottes chacun à l’intérieur, ou d’entreposer tout notre matériel de plein air dans la tente. Nous avons acheté des gros bacs de plastique et entreposons beaucoup de choses à l’extérieur. Par exemple, est-ce que j’ai besoin que tous mes vêtements soient dans la tente ? Non. J’ai quelques paires de combines et de chandails que je porte pas mal tous les jours (hahaha, on oublie l’idée de laver notre linge à chaque 1-2 utilisations ici !). Mes vêtements « de ville » comme je les appelle (jeans, chandails « propres » et autres) sont dans un bac à l’extérieur. « Ouin ça doit pas être chaud quand tu les mets ! » vous vous dites. Avec un peu de planification mentale, vous pouvez certainement imaginer que c’est possible de prendre mes vêtements du bac quelques minutes à l’avance et les laisser réchauffer près du poêle avant de les enfiler. « Ha bein oui, c’est vrai. » C’est ce qui est intéressant avec ce style de vie, de requestionner toutes les choses qu’on fait d’une certaine façon depuis qu’on est petits, mais qui pourraient très bien être faites d’une autre façon quand on y pense bien. Mon auto contient aussi une quantité significative de « biens de ville » comme des bottes fancy ou des manteaux « propres » qui ne sentent pas le feu. Alors quand j’arrive en ville, je me métamorphose comme Cendrillon avant d’aller au bal.
Mais revenons au sujet! En bout de ligne, un coup que cet exercice de triage fut terminé, je me suis rendue compte que d’avoir moins de choses en général est beaucoup plus simple à gérer au quotidien. Faire le ménage de la tente prend environ 5 minutes : remettre les choses où elles vont (car chaque chose a sa place ou son crochet !), secouer les 3 tapis, balayer le plancher, faire la vaisselle, passer le balai, et voilà, on peut relaxer. Choisir mon linge le matin ? Pas vraiment compliqué, j’ai juste 2-3 options par moitié de corps, et souvent ce sera guidé par le thermomètre (froid = polar, chaud = laine mérino mince).  
C’est bien beau tout ça, mais il faut répondre aux besoins essentiels
Boire, se nourrir, faire ses « besoins », se laver (quoi que… ce n’est pas vraiment essentiel quand on y repense bien...) – comment répondre à tout ça !? 

Gestion de l’eau: tu iras su’ Canadian Tire, achète 2-3 cruches de 20 litres, remplie-les chez tes amis quand tu vas en ville ou ailleurs où ils ont de l’eau potable. Done. Quand tu quitteras la tente pour quelques heures, n’oublie pas de mettre un sac de couchage autour de ta cruche d’eau pour éviter que ça gèle. Pour les eaux usées, garde-toi une grosse chaudière que tu videras tous les jours dans un trou pas loin de ta tente : creuse un trou d’environ 1-2 mètre près de la tente pour disposer des eaux usées et minimiser l’impact sur l’environnement. Avec deux cruches de 20 litres d’eau, on peut durer environ 3-4 jours si on fait attention. C’est quoi « faire attention » ? Bien, par exemple, on fait la vaisselle juste une fois par jour pour minimiser la consommation d’eau, on se met un petit bassin d’eau pour se laver les mains au lieu de prendre de la nouvelle eau à chaque fois, on ne mange pas trop de pâtes parce que ça prend beaucoup d’eau pour la cuisson. C’est fou après, quand on pense qu’on prend autant d’eau en 3-4 jours qu’en une demi-journée lorsqu’on habitait en ville, juste en flushant la toilette et prenant une douche ! Ça remet les choses en perspective. 
Manger et entreposer la nourriture : en même temps que tu iras acheter  tes cruches d’eau, prends aussi quelques bacs de plastique AVEC DES ATTACHES SOLIDES POUR SÉCURISER LE COUVERT !! TRES IMPORTANT! Les écureuils pis les souris, ça peut rentrer en dessous de la tente. Si tu prends des couverts sans attaches, tu peux être sûr qu’ils vont se gâter ! On est chanceux, à date, on n’a pas eu de rongeurs dans la tente car on tient ça propre et on ne laisse pas de nourriture trainer quand on est absents, mais c’est assez courant que les gens ont affaire à ce genre de problème dans ce type d’installation !
Si on parle de la préparation de bouffe en tant que telle, les petits poêles Coleman font un excellent travail pour cuisiner – juste à connecter une bonne vieille bonbonne de propane BBQ et tu pourras faire plusieurs semaines sans remplir la bonbonne !
Oh et aussi… entrepose tout ce que tu veux pas qui gèle dans des Coolers… Parce qu’à un moment donné, tu resteras pas dans ta tente 24h sur 24, et oui il va faire -10 en dedans si personne chauffe le poêle, et oui tes tomates et tes concombres vont geler, et quand tu viendras pour faire ta salade pour le souper, ils vont être tout dégueu. T’auras appris ta leçon ce jour là ! Tsé, des coolers, la magie de ça, c’est que ça marche dans les deux sens. Ça garde le stock froid à l’intérieur quand il fait chaud l’été, mais ça garde aussi le stock chaud à l’intérieur quand il fait froid l’hiver. T’avais jamais pensé à celle-là hen ?
Bécosse triangulaire sans porte
Faire ses besoins : avant que le sol gèle à l’automne, tu prendras une pelle, tu creuseras un trou d’environ 2 mètres de profond et 50 cm de diamètre, et tu mettras une belle bécosse par-dessus dont tu auras pris soin de coller du foam autour du siège pour le confort lors des journées froides. Pas besoin de porte, ça fait plus d’aération ! Dans notre cas, la bécosse est environ à 20 mètres de la tente – ça pas l’air loin de même mais quand tu veux juste aller faire pipi peut-être que tu le marcheras pas le 20 mètres. Alors on s’est marqué un « pee spot » juste à côté de la tente pour les #1. L’idée, c’est de ne pas pisser partout, parce que c’est pas super agréable habiter en quelque part où il y a du jaune partout sur la neige, alors en le concentrant à un seul endroit on préserve la beauté du paysage. Pour ceux qui ne sont pas à l’aise de faire pipi dehors l’hiver, vous allez vous habituer… C’est un peu froid mais après quelques jours on n’y pense même plus. Et pour ceux qui vont à la toilette la nuit, vous aurez droit à des beaux spectacles d’aurores boréales et d’étoiles filantes de temps en temps, alors moi je n’envie pas ceux qui ont une toilette intérieure et manquent ces moments magiques.
Creuser un trou pour la bécosse
Se laver : tu vas voir qu’il y a beaucoup de places que tu peux prendre ta douche sans payer (les complexes sportifs sont les plus évidents), et tu choisiras l’endroit que tu préfères avec le temps. À certains endroits, tu peux sélectionner la température de l’eau, et à certains tu ne peux pas. Certains ont des casiers pour t’assurer que tu ne te fais pas voler ton stock pendant que tu prends ta douche, d’autres non. Certains sont propres, certaines sont dégueu. Des fois ya des heures que c’est moins occupé, des heures où tu sais que les douches ont été nettoyées, à toi d’expérimenter. Toutes des choses que tu apprendras sur le tas… Je peux pas non plus toujours te prendre par la main tsé à un moment donné…
Tu apprendras à avoir un « sac de douche » où tu gardes une paire de gougounes, une serviette, ton shampoing et ton savon, quelques sous-vêtements propres et une brosses à cheveux. Je t’avertis d’avance, si tu gardes ton sac dans ton auto ou sur le plancher de la tente, tu feras peut-être face à un problème de savon/shampoing gelé un jour ou l’autre – un problème que seuls tes amis qui vivent dans une yourte ou une tente comprendront. Si tu es assez organisé, essaie de réchauffer tes bouteilles un peu à l’avance. 
Faire son lavage : retour aux souvenirs de Cégep à la bonne vieille buanderie – amène ton savon, ton petit change et quelque chose à faire pendant que t’attends que ton lavage se fasse. Aussi, tu rencontreras peut-être des gens un peu bizarres qui errent à la buanderie, alors attends-toi à sortir tes habiletés sociales, ou aie une bonne distraction qui t’empêche d’interagir (écouteurs dans les oreilles, livre par exemple). Dans mon cas, j’ai eu la chance d’avoir des amis qui m’offraient leurs machines à laver de temps en temps, alors je n’ai pas eu à fréquenter la buanderie tant que ça, good for me. Tu peux aussi opter pour l’option « lavage à la main » un coup mal pris pour les sous-vêtements, et tu fais sécher ça à côté du poêle dans le temps de l’dire !
Se chauffer : tu apprendras à utiliser une scie mécanique de façon sécuritaire pour couper des arbres, et fendre du bois à l’aide d’une hache, toutes des habiletés qu’on n’a jamais eu à utiliser avec notre style de vie urbain ! Tu ne seras pas efficace au début et tu vas perdre beaucoup d’énergie pour rien, mais avec le temps tu vas améliorer ton ratio « nombre de coups donnés sur la bûche / fendre la bûche ».
Ensuite, tu amèneras les bûches et les pilleras dans un endroit protégé de la pluie et de la neige. Le poêle de la tente doit fonctionner non stop l’hiver pour garder une température intérieure au-dessus de 18 degrés, parce que la tente ne garde pas la chaleur longtemps. La nuit, je te conseille de ne pas t’emmitoufler trop chaudement dans tes couvertures car sinon tu ne sentiras pas l’intérieur de la tente devenir froid, donc tu laisseras le poêle s’éteindre complètement, et le matin il fera VRAIMENT froid et ce sera plus long à repartir le poêle que s’il y avait encore de la braise. L’idée, c’est de se lever quelques fois dans la nuit pour remettre du bois et maintenir le feu. Tu vas apprendre, tu vas voir… Laisse toujours quelques bûches près du poêle à l’intérieur pour les faire dégeler avant de les mettre dans le poêle, ça brûle pas mal mieux.
Aussi, petit truc 101 de poêle à bois… Nettoie ta cheminée à chaque 2-3 semaines. Juste un petit conseil pour éviter de te faire boucaner et aussi prévenir un feu de cheminée (!!!) Pas que ça nous est arrivé, une chance! Les cheminées des poêles de tente prospecteur sont beaucoup plus petites que des cheminées de maison, donc il faut nécessairement les nettoyer plus souvent. 
Communiquer : bon ça a l’air bin « wild » comme ça mon style de vie mais je dois admettre qu’on n’est pas totalement retirés de la civilisation. Nous vivons sur le terrain de mon beau-père en dehors de la ville (donc pas de voisins autour) mais le cellulaire rentre encore de façon intermittente (dépendant de la météo !) et il est encore possible de communiquer avec le monde extérieur ou même d’aller sur internet sur notre cellulaire, alors ce n’est pas si « sauvage » que ça peut paraître. Parfois, je souhaiterais presque que nous n’ayons pas accès au cellulaire afin de complètement décrocher de cette plaie, mais en même temps je ne pouvais pas vraiment me le permettre car je travaillais encore à ma clinique et devais gérer les appels de clients, répondre aux courriels, etc. Il faut aussi garder en tête que la vie continue et qu’à moins d’arrêter de travailler complètement, il est difficile de se couper complètement de communications et de vivre la vie des bois, surtout quand on possède une entreprise. 
Bon maintenant que vous êtes experts en tente prospecteur, vous vous dites « Mais c’est quoi l’idée d’aller se compliquer la vie à habiter dans un tel contexte… »
Ouin, pourquoi hen? 
Peut-être pour revenir à la base de qu’est-ce que c’est, vraiment, « vivre ». 
Pour se concentrer à répondre à nos besoins primaires. Arrêter de focusser sur nos problèmes et nos besoins secondaires, aux choses qu’on voudrait et qu’on n’a pas, et toutes les autres choses qui nous rendent pas nécessairement heureux mais qu’on continue à faire quand même pour des raisons absurdes (par exemple passer beaucoup trop de temps sur Facebook dans mon cas). Quand tu as du bois à fendre, de la bouffe à préparer, des chiens à faire courir (ça viendra dans une autre chronique sur le chien de traîneau, qui est notre principale occupation ces jours-ci !), heh bien t’as pas trop le temps de penser à c’est quoi la prochaine chose que je vais acheter ou qu’est-ce que je vais bien faire en fin de semaine, et pourquoi telle personne a pas répondu à mon courriel ou à mon texte. 
Pour apprendre de nouvelles choses, se prouver qu’on peut répondre à nos besoins sans toute la technologie et les bébelles qui tentent d’y répondre dans notre société standard. 
Pour vivre un autre style de vie, se déstabiliser, se surprendre.
Et la raison principale sera détaillée dans la prochaine chronique, mais pour vous donner un avant-goût… Très bientôt, nous partirons en traîneau à chien dans le fond des bois pour vivre dans un chalet pour 2-3 mois, à 50 km de la civilisation. Donc vivre dans la tente était pour nous une façon de s’immerger tranquillement dans ce mode de vie tout en entrainant les chiens pour cette aventure. Plus de détails à venir !
Mais, même après vous avoir donné toutes les raisons du monde, je vais être honnête : quand je passe quelques heures à tricoter une paire de mitaines avec une tisane au chaud dans ma tente prospecteur, je me demande bien qu’est-ce que ça prend de plus pour être heureux. 
S.


  


vendredi 18 novembre 2016

Après 3 ans et demi au Yukon


Après 3 ans et demi au Yukon

« Ah bein r’garde don la grand’ visite ! » que vous vous dites aujourd’hui en apercevant un nouveau billet sur mon blog. 

Ça fait vraiment longtemps que je ne vous ai pas donné de nouvelles. J’étais sûrement tombée aux oubliettes dans votre tête. « Elle est sûrement revenue au Québec » que vous vous êtes dit. Ou peut-être que vous ne vous disiez rien du tout, en fait. La vie continue, après tout. De toute façon, les blogs, c’est même plus à la mode. Tout le monde sait ça.

Heh bien me voici donc. Trois ans et demi après être déménagée au Yukon, j’y suis toujours. Plus que jamais.

C’est drôle, je relisais mon billet « Après 6 mois au Yukon », et je riais de voir à quel point les aspects de la vie yukonnaise que j’y traitais sont rendus tellement intrinsèques et communs pour moi. Tellement que je ne reconnais plus leur côté exotique. Et vous de penser « Bon il va falloir que j’aille relire ce billet-là pour comprendre ce qu’elle veut dire, c’est un peu chiant. » Bien c’est ça la vie, qu’est-ce que vous voulez. Des fois il faut travailler, et on ne peut pas avoir les choses toutes mâchées tout le temps (sur un ton de parent qui parle à son enfant de 5 ans). Bon me revoilà sarcastique – ça revient vite ces petites bêtes-là !

Mais là, ça fait deux paragraphes que vous lisez, et vous vous dites « Get to the point » ou en français « Accouche ! ». Peut-être que vous aurez à vous ajuster au Yukon Time un peu. Relaxez, grande respiration. Inspirez la paix, expirez la tension.

Qu’advient-t-il de moi, après 3 ans et demi au Yukon? Savez-vous quoi, j’ai le goût de faire une liste. Voir le billet « Après 6 mois au Yukon » concernant les avantages de faire une liste dans une chronique (voyez-vous, vous vous en sortirez pas… vous aurez à le lire, le maudit billet, un jour ou l’autre…)

Alors on y va…

- Je suis maintenant complètement bilingue. Le secret ? Travailler en anglais et…. Tomber en amour en anglais!

- Après 2 ans à travailler pour le gouvârnement, j’ai démarré mon entreprise et décidé de quitter la bureaucratie pour embrasser l’autonomie, même si c’était risqué. Vous ne pouvez même pas imaginer à quel point je me sens libre!! Et le meilleur de cette histoire, c’est que les affaires vont bien ! Ma bonne vieille philosophie de quitter la zone de confort pour pouvoir évoluer un peu plus qui revient – pour ceux qui ont lu les autres billets, vous allez me reconnaître.

- Cette autonomie que m’a procurée la pratique privée m’a permis de développer mes talents artistiques, parce que maintenant bin… j’ai beaucoup plus de temps libre car je travaille à temps partiel, comme la plupart des gens au Yukon. « Live first, work after », qu’ils disent. 
Figurez-vous donc que… je suis rendue une artiSS!!! Le Yukon a une scène artistique hyper développée et dynamique, et il faut croire que je me suis laissée entrainer. Comme auteure-compositrice-interprète, j’ai maintenant un démo professionnel à mon actif, j’ai remporté deux concours de musique francophones dans l’Ouest du Canada, je ferai l’ouverture du spectacle de Phlippe Brach en décembre, et… je participerai au Festival de Granby l’an prochain !! Ça roule, ça roule ! Un rêve qui devient réalité !
- Les bottes d’eau et les manteaux patchés avec du duck tape, c’est ma tenue de tous les jours et je m’en fous pas mal même quand je suis en ville, comme bien du monde ici. Ah, et je n’achète plus de linge neuf – vive les échanges de vêtements entre amies et les friperies! 

- J’ai réalisé que ne pas se laver à tous les jours, c’est pas la fin du monde. Même que c’est bon pour la peau – vous essayerez ça.

- Quand j’ai besoin de quelque chose, j’essaie toujours de trouver seconde main en premier. Et de toute façon, dans le Nord, c’est comme ça qu’on survit. Acheter tout en ligne et payer des frais de livraison astronomiques, ça revient cher à la longue. Vive le Whitehorse Buy and Sell  et Kijiji ! Tellement plus économique pour la même qualité, et en plus c’est beaucoup mieux pour la planète que d’encourager la consommation de biens neufs qui se retrouveront un jour ou l’autre dans les vidanges.

- C’est pas du vrai camping si ce n’est pas du camping sauvage. De un c’est bien plus beau, de deux ça coûte zéro pis une barre, et de trois tu as pas besoin de réserver. Qui a besoin d’une douche pis de l’eau potable quand t’as un lac pis un filtreur?

- Je sors maintenant avec un Yukonnais pure laine, un vrai de vrai qui m’a fait découvrir les aspects moins touristiques du Yukon. Je lui dois tellement, avec toutes les choses qu’il m’a apprises (i.e. 50% des éléments énumérées au dernier point de cette liste!) et les endroits incroyables qu’il m’a fait découvrir !   

Vélo de montagne à Grey Mountain
- Je pratique maintenant de nombreuses activités de plein air que je ne pratiquais pas avant, et chacune d’elle pourrait mériter une chronique en soit… le ski hors piste, l’escalade, le canot de rivière, le traîneau à chiens, le ski de patin, le vélo de montagne, la pêche, et bientôt la chasse (j’ai mon permis de chasse et de port d'arme, mais je n’y suis pas encore allée!)

Escalade

- Avec mon copain, j’habite présentement dans une tente prospecteur en dehors de la ville, à 40 km au sud de Whitehorse. Notre mission : entraîner les chiens de son père afin de passer 3 mois dans le fond des bois cet hiver, à 50 km de la route, et s’y rendre en traîneau à chien. L’expérience yukonnaise ultime ! Ne vous inquiétez pas, je lance ça de même, mais plus de détails viendront dans les prochaines chroniques…
Notre maison!

- Les grizzlis et les ours noirs, ça fait partie du paysage, et c’est pas plus grave que ça. Si tu fais du bruit, tu tiens ton campement propre et tu fais pas le con, « everything is gonna be alright » comme Bob disait. Quand je travaillais à l’hôpital, je recevais des courriels de la direction concernant des ours aperçus autour de l’hôpital dans les sentiers – bin oui, ça fait partie du genre de courriel que tu peux recevoir quand tu travailles au Yukon!

- J’ai joué au « Radio Bingo », posez pas de questions, il n’y a pas de réponse.

- Je sais pas ce que j’avais contre Air North dans le billet « Après 6 mois au Yukon » (et là vous vous dites « c’est beau on a compris, lâche le morceau, on va le lire ton maudit billet ». Wow, wow, pas besoin de vous fâcher…), mais Air North c’est la compagnie aérienne la plus dédiée au service à la clientèle que j’ai jamais rencontrée, c’est juste incomparable!! Deux bagages inclus en soute sans frais, un repas gratuit, un biscuit servi chaud en dessert, et un service impeccable. Qui a besoin de l’écran de TV avec les jeux pis les bébelles anyway ? Moi je suis vendue ! En plus, ils vont à Ottawa en vol direct (bah, juste un petit arrêt de 45 min à Yellowknife, ça se prend bien.)

- L’été, je peux compter sur les doigts de ma main les fins de semaine que je reste à la maison. Toujours dehors, toujours en camping.

- Mon char, je peux aussi l’appeler « entrepôt d’équipement de plein air ». Pis je suis pas la seule.

- Mes amis, ce sont tous des gens comme moi qui sont des fans de plein air. Alors c’est pas difficile de trouver du monde pour faire des activités autres que « faire des soupers » et « aller marcher en ville » ou « aller prendre une bière ou un café » (pas de jugement là ! Chacun son genre !)
Ski hors piste dans la White Pass à Feather Peak

- Depuis que je suis ici, j’ai appris à…: reculer un 4 roues avec un trailer, utiliser une scie mécanique, fendre du bois à la hache (mais aucunement efficace pour l’instant), pêcher du poisson et toutes les étapes avant de l’avoir dans l’assiette (le tuer, enlever les organes, faire les filets, l’apprêter, le faire cuire), tirer de la 22 sur une cible, changer mes pneus d’auto toute seule, faire un jardin et récolter des légumes, attacher mon canot sur le toit de mon auto sans aide, diriger un canot sur une rivière, mettre les harnais et attacher les chiens sur le traîneau ou le quatre roues, diriger les chiens de traîneau et les faire courir par moi-même, faire du pain maison à partir de « sourdough », assurer un grimpeur en escalade « top rope » (vraiment très débutant on s’entend), sécurité en terrain avalancheux et tous les tests/observations en montagne qui s’y rapportent, et je pourrais continuer comme ça pendant un bout.

Voilà. C’est tout pour le moment. Je vous reviens avec les détails de l’histoire de la tente prospecteur, du traîneau à chien pis de notre projet de cet hiver dans le bois. Je sais, ça faisait un peu précipité de même là… Mais là, vouliez-vous une liste exhaustive ou une liste à peu près ?? Non sérieusement, je vous donne plus de détails dans les prochaines chroniques, ça vaut la peine. Je voulais juste vous allécher un peu là, un p’tit « tease » comme on dit.

Allez, c’était bon de vous rejaser, mine de rien. 

Les blogs c’est peut-être démodé mais c’est tout autant thérapeutique. 

On reprend ça bientôt, je vous promets que la prochaine chronique ne s’appellera pas « Après 6 ans au Yukon » ;)

S.





samedi 1 février 2014

La première fois

Toute chose a une première fois.

J'ai récemment retrouvé mes écrits de voyage lorsque je suis partie pour la première fois en voyage toute seule. Allemagne, 2009. Bien que je fus partie pour seulement 3 semaines, voyager seule était pour moi un grand défi à relever. Quand l'amie qui était supposée venir avec moi a laissé tombé le projet, j'aurais pu me faire rembourser mon billet d'avion moyennant quelques frais, mais je ne l'ai pas fait.

En relisant mon carnet de voyage, j'ai trouvé intéressant de constater que les sentiments que je décrivais à l'époque avant de réaliser ce défi s'apparentent drôlement à ceux que j'ai ressentis avant de partir au Yukon.

Pour cette raison, vous voici dévoilé le Dimanche 3 mai 2009.

Dimanche, 3 mai 2009

Fred est venu me reconduire à l'aéroport par un temps ensoleillé vers 16h00. Mon vol est prévu pour 19h20 donc j'aurai le temps de relaxer à l'aérogare avant l'embarquement. Le coeur serré, je ferme la portière de la voiture et envoie la main à mon ami, sachant que c'est ici et maintenant que mon aventure en solo débute pour de bon. Je dépose mon gros sac sur mes épaules et repense à ce qu'indiquait la balance avant de partir: "30 lbs, c'est pas si pire!", m'étais-je dit. Finalement, 30 lbs, c'est quand même 30 lbs :P

Donc me voilà à l'aéroport devant l'inconnu. Je sais que pendant au moins 24h, je m'adresserai aux autres à des fins pratiques seulement, et en anglais de surcroît dès que j'aurai quitté Montréal. Bien que mon anglais soit fonctionnel, je ne peux pas me vanter de pouvoir philosopher en anglais ou avoir une vraie conversation fluide avec quelqu'un. Il faudra donc accepter que mes contacts sociaux se limitent à des conversations un peu plus superficielles que celles que j'ai normalement au Québec avec les gens que je rencontre. 

Je jette un coup d'oeil au panneau des départs et repère la zone de check in du vol T5806 en direction de Londres, et je vais déposer mon sac. À partir de là, mon stress s'envole et je deviens un robot qui suit de multiples indications pour se rendre du point A au point B. Je marche d'un pas décontracté, le coeur léger, sans personne pour me stresser ni s'interposer dans mes décisions.

À 18h30, je monte à bord du Thomas Cook Airline au siège 22C. L'avion est découpé en 2 rangées de 3 sièges chacune. Je suis au bord de l'allée, à côté d'un petit couple québécois drôlement stéréotypé. Elle attend son premier - de toute évidence - et se flatte l'abdomen fréquemment, relayé par Lui. Au décollage, Elle a le hublot et regarde le paysage aérien, les yeux grands écarquillés et un sourire aux lèvres (et la main sur l'abdomen, fallait-il vraiment le mentionner?). Lui se fout bien du décor montréalais vu d'en haut, il préfère contempler l'émerveillement de sa douce discrètement en souriant.

Je mets mes écouteurs au décollage, prenant soin d'attendre que les hôtesses de l'air aient bouclé leurs ceintures, car je sais que les "headphones are forbidden during the airplane takeoff Miss". Je choisis soigneusement les notes qui marqueront mon envol: Giver de Patrick Watson. Un sourire se dessine sur mon visage: libre!

Je tente de m'endormir, vainement. Les cervicalgies m'en empêchent. Le premier repas est servi: des patates rondes avec une maigre portion de boeuf et sauce brune, et des fèves trop cuites que je ne me risque pas à manger. Tout est emballé individuellement et sera probablement jetté aux ordures quand l'avion sera nettoyé à Londres. Mon côté environnemental s'en voit brusqué. Je ne fais pas de commentaires au personnel; commencer mon voyage en chiâlant n'est peut-être pas la meilleure des idées.

Par la suite, l'avion est enfin plongé dans le noir et je me surprend à dormir très superficiellement. Elle et Lui jouent aux cartes avec des étincelles dans les yeux pendant ce temps. Ça ne me surprendrait pas qu'il la laisse gagner pour ne pas la contrarier et risquer de créer un stress supplémentaire pour le bébé. Ils doivent être le genre à prendre des cours prénataux ensemble et avoir 10 000 bouquins sur la grossesse, des articles sur pourquoi c'est dangereux de manger des sushis quand t'es enceinte, etc. Arf, je sais que j'suis langue sale. Mais que voulez-vous, je suis seule, et j'ai juste ça à faire observer les gens et leur inventer une vie. Je sais je sais, c'est pas une raison vraiment valable. So what?

Ensuite vient le petit déjeûner; le soleil se lève au bout de l'aile et nous quittons l'océan vers les terres du Royaume Uni. L'atterrissage se passe bien, personne n'applaudit et je n'ose pas partir le bal.  Pauvre pilote; il doit se dire "ils sont bein plates eux autres à matin". Il est 7h lorsque je mets les pieds à Gatwick. Mon vol pour Munich est prévu pour 13h00; petit calcul rapide: il me reste 6h à glandouiller ici. Bah... anyways je ne suis pas pressée. J'ai salement besoin de dormir à l'horizontal! 

Je ramasse mon sac sur le tapis roulant (1er soulagement: mon sac n'est pas ailleurs qu'ici!) et je vais faire le tour de l'aéroport pour trouver l'endroit le plus confo pour grabatter. Je trouve un Starbuck Café avec des divans en modules où plusieurs y ont déjà établi leur quartier général pour la prévention des cernes. Il reste 2 modules libres donc je m'y rue avec empressement; pas de café pour l'instant, j'ai juste besoin de sommeil. Je m'étend sur mon oreiller  i.e. imperméable replié en boule, et comme couverture mon paréo. J'y sombre jusqu'à 9h15 sans manquer d'ouvrir l'oeil aux 15-20 minutes pour vérifier que mon habitat n'est pas menacé. Je pense aux hommes de caverne; ça devait pas être reposant dormir dans une grotte avec toutes sortes de créatures qui menacent de te bouffer à tout moment! Je suis reconnaissante d'être née à l'époque où la plus grande menace qui me guette est à la limite un pick-pocket. En y pensant bien, j'aime mieux un pick pocket qu'un lion affamé... T'as plus de chances de survivre, statistiquement.

Ensuite je me prend un Café Latté avec un muffin aux bleuets, et je suis fière de constater que j'ai pu commander sans me faire demander de répéter. Il faut dire que la commis ne semble pas trop British selon son accent, donc j'imagine qu'elle a eu plus de facilité à comprendre mon accent de québécois qui essaie de parler avec un accent américain avec plus ou moins de succès.

Je lis 1-2 chapitres de l'Avaleur de Sable de Stéphane Bourguignon, et ça me rend de bonne humeur. Ensuite vers 10h30 c'est l'heure du check in pour mon 2e vol vers Munich. J'me retape la même galère qu'à Montréal, mais avec des indications un peu moins claires et des British qui se forcent plus ou moins pour se faire comprendre.

Dans 20 minutes, je devrais savoir à quelle porte me rendre pour reprendre l'avion. On se rejase à Munich - quoi que le verbe "jaser" ici est pas mal unidirectionnel donc il en perd un peu sa pertinence...

By the way, la liberté, on y prend goût rapidement :)

S.

 La première fois qu'on relève un défi, le premier sentiment qui nous frappe est la peur. Puis, après les premiers pas, l'énergie et l'adrénaline vous frappent de plein fouet, et ensuite, il suffit de se laisser mener par la vague. Vivre chaque moment pour ce qu'il est, et l'apprécier. Et grandir.

Sachant cela, la prochaine fois que vous aurez peur de relever un défi, que ce soit une course à pied d'une distance que vous n'avez jamais faite auparavant, un voyage, un examen, un retour aux études, n'importe quoi qui vous sort de votre zone de confort, eh bien dites-vous que vous êtes seulement à quelques pas de vivre une expérience extrêmement enrichissante, quelle qu'elle soit. Quelques pas seulement... Ayez confiance et faites le pas ;)

S.

mardi 3 décembre 2013

Citation de décembre

 “I would rather be a superb meteor, every atom of me in magnificent glow, than a sleepy and permanent planet.”
Jack London


mardi 26 novembre 2013

La grande noirceur


Je ne réfère pas ici à l'époque de Maurice Duplessis, mais bien à la noirceur au sens propre.

Tsé quand ta lampe frontale fait partie de ton "kit" pour aller promener le chien le matin... ainsi que lorsque tu reviens de travailler, j'pense que c'est parce que c'est assez noir. Aussi, quand tu peux voir la Grande Ourse en t'en allant travailler... ah pis je pense pu que j'ai besoin de donner d'autres exemples.

Heh oui, à partir du 21 juin (solstice d'été) jusqu'au 21 décembre (solstice d'hiver), le Yukon se plonge graduellement dans la noirceur. En gros, nous devons passer de 23h d'ensoleillement par jour (solstice d'été) à 7h d'ensoleillement par jour (solstice d'hiver)... ce qui est assez extrême!!! Vous pouvez consulter au bas de cette chronique un tableau de la progression. En été, on remarque à peine les changements d'une journée à l'autre, car les différences s'effectuent lorsqu'on dort (très tard le soir et très tôt le matin). Par contre, dès septembre/octobre, on commence à sentir beaucoup plus le changement de jour en jour.

Comment "passer à travers" cette grande noirceur? Quelques petits trucs personnels...

- Se procurer une lampe "simulateur d'aube" pour vous réveiller naturellement et "déjouer" votre cerveau. La lampe commence à éclairer graduellement 30 minutes avant l'heure que vous aurez déterminé comme votre heure de réveil, et vous vous réveillerez sans aucune alarme. Pour les sceptiques/insécures, vous pouvez programmer la radio à la fin du cycle de 30 minutes pour être sûrs de vous réveiller...

- Se procurer une lampe de luminothérapie à utiliser lors du déjeuner pour stimuler la synthèse de vitamine D et remplir ses réserves d'énergie pour bien commencer la journée.

- Aller marcher sur l'heure du dîner et profiter du soleil pendant qu'il est là!

- SE PROCURER UNE LAMPE FRONTALE!!!

- Au lieu de chiâler qu'il fait noir, intéressez-vous à l'astronomie et profitez de cette période de l'année pour apprendre de nouvelles constellations.

- La fin de semaine, SORTEZ DEHORS!!! Et arrangez-vous pour: 
A) avoir préparé votre stock la veille  ou
B) vous lever très tôt pendant qu'il fait noir pour préparer le lunch et l'équipement
...l'idée est de ne pas perdre trop temps le matin et sauter directement dans la voiture pour se rendre à destination (temps perdu le matin à se demander "sont où mes guêtres?" ou "c koi qu'on va manger?" = arriver tard sur les pistes = peu optimal si le but est d'emmagasiner de l'énergie solaire!)

- Abonnez-vous au centre de ski de fond et allez skier sur les pistes éclairées afin de prendre un peu d'air le soir. Emmenez votre LAMPE FRONTALE (déjà recommandée ci-haut) pour vous aventurer sur les pistes non éclairées et avoir plus de possibilités de sentiers.

- Trouvez des projets divers à réaliser à l'intérieur et que vous n'avez jamais le goût de faire l'été pcq il fait trop beau (ex: décider quoi faire avec toute cette laine que vous avez acheté compulsivement en ligne il y a quelques mois en vous disant "je trouverai bien qqch à faire avec ça")

- Fêtez le solstice d'hiver avec quelques bonnes bouteilles... une de celles que vous avez acheté à la SAQ Dépôt avant de traverser le Canada, car vous vous disiez que ça valait bien la peine de remplir le char puisqu'il paraît que dans le Nord on payait le double pour des bouteilles de moindre qualité. Après vous l'aviez regretté, quand vous aviez réalisé qu'il faudrait charrier vos 4 caisses de bouteilles de vin dans les hôtels sur la route entre Québec pis Whitehorse, pcq ça risquait de geler si vous les laissiez dans le char toute la nuit.... Mais anyways, quand au 21 décembre vous réaliserez que les journées commenceront à rallonger le lendemain, vous ne penserez plus à ça, et vous allez boire à la santé du solstice d'hiver :)

S.

** En passant, la semaine dernière à Whitehorse nous avons eu des températures entre -25 et -30°C, mais honnêtement c'était pas si pire que ça comparé aux -15 humides et venteux de la ville de Québec! Merci Québec de m'avoir entraînée le mental!!!

Caribou Mountain - Novembre 2013

http://www.yukonmd.ca/hoursofdaylight.php

Whitehorse
Date Sunrise Sunset Sunlight Twilight Natural Illumination
January 1 10:09 15:58 5.81 1.97 7.78
February 1 09:19 17:10 7.85 1.62 9.48
March 1 07:58 18:28 10.50 1.42 11.93
April 1 06:22 19:47 13.42 1.47 14.89
May 1 04:52 21:04 16.19 1.86 18.06
June 1 03:41 22:17 18.59 3.19 21.79
July 1 03:35 22:33 18.97 3.98 22.95
August 1 04:37 21:34 16.94 2.09 19.02
September 1 05:55 20:04 14.15 1.53 15.68
October 1 07:00 18:30 11.37 1.41 12.78
November 1 08:27 16:59 8.53 1.55 10.08
December 1 09:43 15:56 6.22 1.88 8.10

mardi 8 octobre 2013

Après 6 mois au Yukon

Bein quoi? Vous êtes surpris? Vous pensiez que j'étais revenue au Québec suite à ma chronique "Je me souviens"? Heh non! J'avais juste rien à dire pendant 2 mois, ne m'en voulez pas. C'est pour vous que j'fais ça. Pour vous assurer une certaine qualité de chronique.

Ça fera bientôt 6 mois que nous sommes déménagés au Yukon, et donc je sentais qu'une petite mise à jour s'imposait (il n'est pas trop tôt...) Pauvres vous-autres... Je doute même que vous êtes encore là!

Voici donc un heureux mélange de trucs que j'ai appris/changements qui sont survenus dans ma vie depuis que je vis au Yukon. Vous l'apprendrez un jour si vous rédigez un blog, mais faire des listes est une technique intéressante pour éviter d'avoir à pondre un texte qui se tient, qui est pertinent et qui a un fil conducteur. Finalement, c'est un peu lâche, je l'avoue, mais c'est efficace et ça dit ce que ça l'a à dire.

Bon, allons-y.

1-  J'ai maintenant un canidé qui réside sous mon toit, comme la plupart des Yukonnais.
Raven, notre nouveau chien
2- De mon balcon, il y a parfois des silhouettes vertes qui dansent dans le ciel étoilé.

3- Je peux marcher avec aisance (lire "en sifflotant") dans la forêt sans être accompagnée d'un autre être humain (mais le canidé est toutefois nécessaire... j'dois dire).

4- Quand je raconte à mes amies du Québec des histoires se rapportant à mon travail, je dois y penser deux fois pour utiliser des termes en français.

5- Quand je vois un renard traverser la rue sur mon heure de lunch, je me dis "ah bein, un renard!", et il se pourrait que j'oublie de rapporter cet évènement à mes collègues.

6- Je me suis commandée une lampe simulateur d'aube, parce que quand tu te lèves le matin et que ya encore des étoiles, ton cerveau comprend juste pas.

7- Comme toutes les voitures yukonnaises, nous avons maintenant un branchement qui sort de notre capot de voiture. 

8- Il y a 3 jours, on a posé nos pneus d'hiver. Pas parce qu'on exagère. Parce que y'annonçaient de la neige cette semaine.

9- La fin de semaine passée, on a fait une randonnée, et j'me suis dit "avoir eu mes raquettes, ça aurait été mieux".
Paddy Peak (région de Carcross) - 6 octobre 2013


10- Depuis juin, nous avons maintenant un colocataire, car payer 1700$ de loyer par mois, on trouvait ça un peu exagéré (!!)

11-  On a compris que si on va en Alaska, il faut y aller minimum 48h. Oui parce que l'Alaska c'est cool, mais surtout parce que c'est le temps minimum de séjour pour pouvoir ramener de la bière. Pis la bière de l'Alaska, tu en veux. Tu en veux DES LITRES!!!

12- Quand tu marches peinard en quelque part en ville et que tu vois un aigle qui survole ta tête, tu sors pu ta caméra. Tu l'admires, tu souris, pis tu continues ton chemin.

13- Tu peux être cheap dans vie, mais j'te conseille pas de l'être pour t'acheter des jumelles. En tout cas, pas si t'habites au Yukon.

14- Je considère vendre mon vélo de route. Parce que le vélo de montagne c'est bein plus l'fun!

15- Quand j'vois du monde stationnés dans le sens contraire de la rue, bein c'est pas plus grave que ça.

16- Quand je croise des gens dans mon quartier, connu ou non, je ne me limite plus à un simple "bonjour". Je parle de météo, ou autre niaiserie. Bein oui. Moi, je fais du small talk, pis j'aime presque ça. Incroyable non?

17- Je sais dorénavant que tu ne fais pas ton épicerie le dimanche soir. À moins de ne pas vouloir de légumes.

18- Si t'as des "commissions" à faire, arrange-toi pour les faire le samedi. Parce que le dimanche, ya rien d'ouvert, sauf le Wal-Mart, le Canadian Tire pis le Super Store. Ah pis les commerces ouverts jusqu'à 9h le jeudi et vendredi soir, c'est juste dans le Sud qu'ils sont assez crinqués pour travailler aussi tard.

19- Si t'es invité pour manger quelque part, attends-toi pas à t'en tirer en emmenant juste une bouteille de vin. Ici, fais-toi à l'idée, c'est toujours un pot-luck. Alors force-toi un peu ;)

20- Si une nouvelle personne t'es présentée, tu vas sûrement te rendre compte tôt ou tard que cette personne est en fait l'amie de telle personne que tu connais, ou la fille de ta collègue, ou l'intervenante qui a soigné ton ami l'autre fois, (...)

21- Après le mois d'octobre, West Jet ne dessert plus Whitehorse, alors tu vas être pogné pour prendre Air North si tu voyages. Zut. Tu devras attendre jusqu'en mai, prends ton mal en patience!

22- J'aime maintenant la musique country. (je gardais le clou pour la fin....)


S.




jeudi 25 juillet 2013

J'me souviens.


J'me souviens quand j'ai vu pour la dernière fois mes parents. Je les ai serrés fort en essayant de pas pleurer, mais ça a foiré. Et ensuite on est rentrés dans l'auto. On a reculé dans l'entrée, mes parents pleuraient aussi, et ils ont rapetissé dans le rétroviseur. Ah oui avant ça on a pris une photo à côté de l'auto. C'était la dernière fois que je les ai vus. Vus pour vrai j'veux dire.

J'me souviens quand j'suis arrivée ici et qu'on est allés au Wal-Mart parce qu'on était pas encore branchés chez nous. J'étais dans le McDo du Wal-Mart, ouais, je pensais pas me rendre jusque là un jour, mais j'y étais. En y repensant bien, je pense même qu'on y a mangé. J'me souviens que les gens nous disaient bonjour d'un signe de tête, et que j'me suis dit que c'était la première fois que je rentrais dans un Wal-Mart et que les gens me saluaient sans me connaître. J'me suis sentie chez-nous, dans un Wal-Mart.

J'me souviens de ma première journée de travail. À la fin de la journée, j'en voulais à l'Anglais d'être une langue que je n'avais pas apprise dès mon jeune âge. J'évitais de parler à ma collègue de bureau à partir de 3h, car je savais que l'influx nerveux qui voyagerait entre l'intention de communiquer et la communication elle-même se perdrait en quelque part sur le chemin, et que ça finirait mal tout ça.

J'me souviens de ma traversée du Canada comme d'un pas vers l'inconnu et la liberté.

J'me souviens de m'être demandée si c'était bien à moi que cet inconnu parlait en traversant la rue en ville, il disait "Isn't it cold today?". J'ai vu qu'il n'y avait personne d'autre autour de moi; j'ai conclu qu'il me parlait, J'ai dit "Yeah!", parce que c'est tout ce que j'ai trouvé à dire, sous le choc.

J'me souviens quand ma mère m'a envoyé les photos du tracteur à mon père et de la nouvelle maison de mon frère. Je me suis sentie loin. Trop loin.

J'me souviens quand on est entrés dans notre appart pour la première fois, et qu'en montant au salon on a constaté qu'on avait une vue sur les montagnes. J'ai fait le tour du condo 2 fois en courant et en criant de joie. J'avais le goût d'appeler chez nous pour leur dire, mais on n'était pas branchés j'vous ai dit... 

J'me souviens d'un soir que je glandouillais sur youtube à regarder des vidéos de cyclistes qui ont traversé le Canada. Yen a un qui est parti de l'Alaska et a fini à l'I-P-E. Arrivé au Québec, une chanson des Cowboys Fringants, et le fleuve. J'ai pleuré.

J'me souviens, à ma première visite au Super Store, d'avoir été à la fois contente et découragée lorsque j'ai marché dans la rangée des produits asiatiques. 20 kilos de riz à sushi qui ont traversé le Canada pour rien, à partir de la Montagne Dorée à Québec. Mais c'est pas si grave que ça, vous allez dire. Vous avez raison.

J'me souviens du matin qu'on est partis, le café dans l'auto, 7h du matin. On avait des sandwichs du buffet familial de la veille comme lunch. J'ai pris un vidéo en sortant de la cour, pour mon montage, mais aussi pour moi. Pour pouvoir dire "J'me souviens".

J'me souviens d'avoir écrit sur ce blog que lorsqu'on part, il faut entrevoir une autre façon de vivre ses relations, par skype, ou par courriel. Ce que j'ai pas dit, c'est que ce n'est pas nécessairement facile.

S.